Kawasaki à fond sur l’hydrogène

Ce nom est connu dans la moto, mais la firme japonaise est aussi un acteur du secteur maritime particulièrement actif dans l’hydrogène.

Kawasaki Heavy Industries, c’est un groupe global qui regroupe une centaine d’entreprises, à la fois au pays du soleil levant et à travers le monde. Il fait des trains, des bateaux, des hélicoptères, des robots et encore bien d’autres choses. Sous le nom « Hydrogen Road », Kawasaki a mis en place une organisation qui traite à la fois la production, le stockage et les usages liés à l’hydrogène.

Le projet le plus connu est un « hydrogénier », qui s’appelle le Suiso Frontier. Ce gros cargo a été conçu pour aller chercher de l’hydrogène liquide en Australie. Ce qui fait polémique, c’est que cet hydrogène est brun. Il est obtenu à partir de charbon : un produit à base d’hydrocarbures, mais qui a la particularité d’être très abondant dans la vallée Latrobe (Etat de Victoria). Présent à 5 mètres sous terre, ce charbon peut assurer pendant 240 ans l’équivalent de la consommation totale d’énergie électrique au Japon, dès lors qu’il est converti en hydrogène. Et en l’occurrence, c’est sous la forme liquide, à moins 253 degrés, qu’il sera transporté jusqu’au pays d’origine de Kawasaki. Il se trouve que le groupe a un savoir-faire en matière de cryogénie. En 1981, il avait déjà conçu un cargo transportant du gaz liquide (LNG) à moins 162 degrés. Le Suiso Frontier devrait faire son premier voyage dans moins d’un an pour aller chercher sa précieuse cargaison au pays des kangourous. A son bord, le cargo peut stocker assez d’hydrogène liquide pour alimenter 15 000 véhicules à pile à combustible.

Une fois acheminé jusqu’au Japon, cet hydrogène sera acheminé par des containers transportés par des camions jusqu’aux lieux de consommation. Là encore, Kawasaki peut faire valoir son expérience dans le gaz liquide (mais, le groupe maîtrise aussi le stockage sous forme gazeuse, avec des cylindres en matériaux composites). En fait, cette expertise est aussi à mettre sur le compte de ses activités aérospatiales. Le géant travaille en effet avec l’agence spatiale japonaise (JAXA), pour laquelle il développe des réservoirs destinés aux fusées. De plus, il a mis en place le premier terminal d’hydrogène liquide à l’aéroport de Kobe. Baptisé « Hy Touch Kobé », c’est le premier au monde dans la catégorie. Le groupe industriel vient de démarrer d’ailleurs au Japon la vente d’un système qui permet de liquéfier l’hydrogène. Il fonctionne pendant plus de 3 000 h et a la capacité de produire sous cette forme 5 tonnes par jour (de quoi alimenter en théorie 1 millier de véhicules à pile à combustible). Kawasaki a développé en interne son procédé de liquéfaction. Il a pu s’appuyer sur son expertise des moteurs à rotation rapide, comme ceux qu’il produit pour les jets et les turbines à gaz. Le système est assez compact et peut être démarré en moins de 24 h après son installation. Il garantit par ailleurs un hydrogène pur à 99,999 %.

Kawasaki traite également l’hydrogène sous d’autres formes. Il l’utilise par exemple comme carburant pour des turbines à gaz. En 2018, la technologie a été déployée dans des usines publiques générant du chauffage et de l’électricité. Sur le port de Kobé, un autre démonstrateur a été mis en place entre 2015 et 2018, avec un mélange de gaz et d’hydrogène sur une turbine d’une capacité de 1 MW. L’avantage vient du fait que le géant nippon a développé une chambre de combustion mixte, flexible au niveau des carburants (gaz ou hydrogène, ou mélange des deux), et permettant de contenir les oxydes d’azote (Nox) tout en assurant une combustion stable. C’est un vrai défi, car l’hydrogène s’enflamme 7 fois plus vite que le gaz à haut température. L’industriel a mis au point un procédé Dry Low NOX qui permet d’injecter l’hydrogène en petites quantités et d’obtenir des microflammes, sans avoir à ajouter de l’eau. Un procédé qui tend vers le zéro émission.

Et puis, dans les bateaux, Kawasaki Heavy Industries a décidé d’explorer le domaine des moteurs de marine fonctionnant à l’hydrogène. Il a monté en ce sens un consortium avec deux autres industriels japonais, Yanmar Power Technology et Japan Engine Corporation. Leur intention est de mettre sur le marché de tels moteurs en 2025, à bord de des navires croisant dans les océans et le long des côtes, et de s’assurer un leadership mondial. Les trois partenaires vont travailler chacun sur un type de moteur (à rotation rapide, moyenne ou lente), en 4 temps comme en 2 temps, afin de couvrir les différents usages. Le consortium va aussi travailler sur le stockage de l’hydrogène. Cette alliance a pour vocation à décarboner le transport maritime et à revitaliser au passage l’industrie du Japon dans ce domaine.

Enfin, aux côtés de Toyota et sept autres entreprises (Eneos, Iwatani, Kobe Steel, Mitsui, Sumitomo Mitsui Financial, Kansai Electric Power, Toshiba), Kawasaki Heavy Industries fait partie de la Japan Hydrogen association (JH2A). L’objectif est de développer la chaîne d’approvisionnement de l’hydrogène et de promouvoir les initiatives visant à accélérer son utilisation grâce à la collaboration des gouvernements et des entreprises.

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